jeudi 19 avril 2012

Kajero en expo à l'institut français du Bénin

Arts plastiques au Bénin


Kajero, l'appel au saut sur la chaise


Depuis le 5 avril dernier, Kajero se trouve en exposition à la Salle Joseph Kpobly de l'Institut français du Bénin. 15 tableaux et 1 installation sont à savourer sur le thème "A chacun sa place". Il y a juste de quoi rappeler à chacun de vite retrouver sa chaise et d'y sauter pour l'occuper, de peur de rater le sens de sa véritable vie.


Dans l'exposition, "A chacun sa place", lancée depuis le 5 avril dernier par l'artiste-plasticien camerounais, Kajero, à la Salle Joseph Kpobly de l'Institut français du Bénin, 15 tableaux se disputent le regard du visiteur.


Le livre artistique "Kaje", à la salle Kpobly de l'Institut français du Bénin

Mais, d'emblée, l'essentiel du message de cette initiative est livrée dans l'installation que l'exposant propose ; c'est une attaque, une grande accroche sous la forme d'une chaise rouge qui symbolise l'être humain - puisqu'elle a la couleur de notre sang, cette chaise emprisonnée dans une cage blanche paradoxalement dénuée de barreaux, ce qui laisse croire qu'en réalité, l'homme s'enferme alors qu'il doit jouir d'une liberté programmée par la nature pour faire tout ce qu'il veut, pour réaliser les ambitions qu'il se donne. Cette chaise, c'est le signe de la place unique qu'il revient spécifiquement à chaque être humain d'occuper, comme un Adn qui n'identifie qu'une et une personne ! Kajero, rencontré à juste titre sur les lieux de l'exposition, confirme : "La place dont je parle, c'est la mission pour laquelle on est né et, il faut s'écouter soi-même pour la découvrir ; chacun a une place qu'il doit occuper, si elle est occupée par quelqu'un d'autre, cette personne ne peut faire exactement ce à quoi tu étais destiné : chaque personne est unique et a sa vision, sa manière de faire les choses, propre à elle."


L'artiste, Kajero ...

Donc, ce n'est pas pour rien que cette installation s'intitule "Kaje" ; c'est un peu comme le diminutif de Kajero, pour montrer que le livre artistique et même toute l'exposition - qui se termine le 3 mai prochain - sont la marque de l'expérience personnelle d'un artiste qui, s'il n'y avait pris garde, ne se serait jamais retrouvé à Cotonou pour exercer en tant qu'artiste, mais habiterait le Cameroun, son pays d'origine, en train de réaliser la vision professionnelle d'homme de science de ses parents. "Kaje" avec "j" semble aussi le signe de cette cage rendue fausse, illusoire, factice par le dernier mot qui revient à l'être humain de découvrir son destin, de l'accepter, de l'assumer et de le réaliser courageusement.

L
a chaise, marque déposée

La chaise, voilà aussi le dénominateur commun à tous les tableaux ; elle marque de son sceau l'un ou l'autre, en lot ou de manière isolée. Et, de manière transversale, elle irradie des thèmes d'une simplicité, d'une profondeur et d'une vigueur incontestables, notamment, la nécessité de se battre pour remporter ses objectifs, la sérénité de la mort, l'intuition comme la voix de Dieu en l'homme. Par ailleurs, les 15 tableaux proposés font intervenir des couleurs de tous genres, montrant ainsi le refus de se limiter de Kajero qui se révèle un patient créateur quand l'on comprend qu'outre la papier mâché qu'il utilise, les pigments, la peinture à huile, les pastels, la craie à peindre, il y a aussi les sciures de bois, les sciures de bois de chaise ! Comme une résurrection thématique et spirituelle. Il n'y a rien à y redire : Kajero, dans notre univers domestique, professionnel ou de tout autre ordre, cela reste la garantie de la profondeur en expression au quotidien des réalités de notre existence ; c'est la lecture des exigences que la providence attend que nous réalisions, c'est booster nos défis ...


Marcel Kpogodo

mercredi 18 avril 2012

Farouk Abdoulaye au Fitheb 2012

Fitheb 2012


La flamboyance d'une installation


Depuis le samedi 7 avril dernier, le Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb) a fermé ses portes. Douze jours auparavant, acteurs, comédiens, metteurs en scène, promoteurs culturels, scénographes, ingénieurs de son et de lumière, notamment, d'une part, et commerçants de tous ordres, artistes de la musique, d'autre part, s'étaient fait valoir, les premiers, dans les différentes salles de spectacles retenues à travers le pays et, les seconds, au village du Fitheb, qui s'est animé au Stade de l'Amitié de Cotonou.

Néanmoins, une production artistique particulière, créée dans le cadre du même Festival, a été aussi mise en exergue et a fortement focalisé l'attention : la grande installation réalisée par le scénographe béninois, Farouk Abdoulaye. C'était au niveau du portail du Fitheb, celui donnant entrée au Village justement mis en place pour accueillir les commerçants animateurs des stands.


Le règne des parapluies

Comme pour partager la logique de la tutelle et de la protection, le parapluie était roi dans cette installation réalisée par Farouk Abdoulaye, au niveau du Portail du Fitheb. Au nombre de 12, ces parapluies matérialisent, rappellent qu'il s'agit de l'année 2012, celle de la tenue de la 11ème édition du Festival. Lorsque les éléments de ce chiffre se fusionnent, nous avons 3 symbolisant le pouvoir, l'affirmation et l'autorité, ce qui donne à penser que l'artiste entendait rester en phase avec la logique des dirigeants et des organisateurs du Fitheb 2012, celui-ci qu'ils ont considéré comme "L'édition du Renouveau", celle qui devait permettre à cette institution internationale de revenir s'imposer comme celle incontournable en matière de théâtre en Afrique. Voilà une image que le Fitheb 2012 a réussi à restituer à juste titre, à travers la rigueur dans la sélection de pièces de haut niveau et, entre autres, par la diversification des activités d'expression artistique et par le retour de grands sponsors et d'institutions de financement qui s'étaient éloignés du Fitheb.


Le livre scénique de Farouk Abdoulaye, au Stade de l'Amitié, au Fitheb 2012

Ce même contexte de trinité, avec le chiffre 3, se met en symbiose avec les trois grands domaines qui ont servi de canal aux artistes de tous bords pour manifester et faire plaire leur savoir-faire en art : le théâtre, la danse et la musique.

Par ailleurs, cette installation a laissé Farouk Abdoulaye faire parler l'harmonie de couleurs multiples, comme s'il avait choisi de montrer que le Fitheb 2012 renaissait avec des inspirations de toutes variétés et, les têtes d'oiseaux ornant les deux panneaux du portail allant de la droite vers la gauche symbolisent justement ces voyageurs interminables que sont les festivaliers, les directeurs de troupes et de compagnies, de festivals, se mouvant d'un horizon à l'autre, d'un pays à l'autre, d'une région à l'autre et à travers les continents, pour passer le message de leur pertinence artistique. Finalement, Farouk Abdoulaye n'aura rien oublié, surtout lorsque le portail dresse ses panneaux, il se métamorphose en un couloir s'ouvrant aux stands de tous genres, s'animant durant la tenue du Festival.


Le pouvoir de la nuit

Dans l'écriture de son installation, Farouk a imposé que son oeuvre se fasse remarquer en plein jour. Ceci était davantage le cas pour la nuit. Elle rayonnait et, de loin, les parapluies multicolores, couvant chacun une ampoule, devenaient des étoiles qui appelaient à la découverte, ce qui a été, pendant les 12 jours du Festival, un coup réussi de polarisation de l'attention du curieux sur ce qui se passait au-delà du portail.


Farouk Abdoulaye

Le public, circulant lentement et circonstanciellement sur cette partie de l'esplanade du Stade de l'Amitié, devait s'arrêter, se poser des questions, risquer des réponses personnelles avant de faire le choix d'un arrêt plus long pour aller à la découverte de la vraie information, celle relative au déroulement du Fitheb, dans l'un des programmes retenus pour le moment de la visite.

En réalité, du Fitheb 2010 à celui que nous venons de finir de vivre, Farouk Abdoulaye a réalisé et imposé une marque d'une originalité irréfutable. Ce livre de scène se trouve le résultat de la fusion d'inspirations de plusieurs esprits de métier : menuisier, peintre, soudeur, électricien, entre autres. Voilà un autre aspect de sa force : se concilier la spécificité et le génie professionnels de corps a priori difficilement attendus dans l’accouchement d'un livre tel que l'installation publiée, le 26 mars dernier, au Stade de l'Amitié. Une étoile de plus à sa boutonnière d'artiste, ce Farouk . . .


Marcel Kpogodo