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mercredi 27 mars 2019

Rafiy Okéfolahan à Cotonou : l’art au service de la paix

Dans le cadre de son exposition ’’Mots magiques’’

Depuis la soirée du jeudi 21 mars 2019, l’artiste plasticien béninois, Rafiy Okéfolahan, laisse voir ses œuvres par le public à la galerie de l’Hôtel ’’La Maison rouge’’, à Cotonou. Intitulée ’’Mots magiques’’, son exposition, ajoutée à trois autres stratégies d’expression artistique, exhorte à ce que souffle un vent de paix, notamment, sur le Bénin.

Rafiy Okéfolahan
Abondance, exubérance, variété, chaleur, épaisseur, vivacité et force, pour appeler à la paix entre les hommes. Les caractéristiques des couleurs déployées par la vingtaine de toiles que présente l’artiste béninois, Rafiy Okéfolahan, dans le contexte de l’exposition ’’Mots magiques’’ dont le vernissage s’est tenu le jeudi 21 mars 2019, en début de soirée à la galerie de ’’La Maison rouge’’ de Cotonou.  
Pour des tableaux dont certains sont de grande dimension, notamment, 2,5m x 1,5m et 2m x 1,5m, le bleu, le rouge, le jaune, le blanc et le noir, entre autres, se déploient généreusement, tantôt pointant des personnages nettement détachables, tantôt laissant imaginer d’autres que l’inspiration du moment ose manifester : « Je navigue entre abstraction, figuratif et impressionnisme », s’en explique Rafiy Okéfolahan, alias Rafiy, un artiste dont la démarche de peinture, les années aidant, a évolué puisque les numéros de téléphone parsemant ses tableaux sont devenus rares, de même que les couleurs qui lui servent à transmettre un message sont plus diversifiées et que les couches qui établissent ces couleurs sont plus épaisses. Un nouveau tournant, inévitablement. 
Ce pas, Rafiy le franchit en toute sérénité, troquant ses numéros si chers, par le passé, contre des mots, ceux-ci, « magiques » par le fait que, pour ce créateur, sa consultation de l’actualité par la presse, la radio, la télévision et à travers Internet ne lui montre pas un fonctionnement reluisant du monde. Et, ce type spécifique de mots, ne les possédant pas encore, il va à leur quête. En attendant que l’artiste les trouve et qu’il les partage avec le public, aller voir l’exposition ’’Mots magiques’’ à la galerie de ’’La Maison rouge’’ sis zone des villas de la Cen-Sad, sur la Route de l’Aéroport, à Cotonou, amène à réjouir ses yeux et à réchauffer son cœur. En effet, ce qui contribue à ces états heureux : d’une part, une harmonie bien conçue, bien construite des couleurs et, d’autre part, la vie qu’elles suggèrent, dans sa beauté, sans oublier l’inattendu et la variété des champs que l’artiste choisit pour ses messages, que nous soyons en politique, en faits de société ou en réalités culturelles et cultuelles.
D’ ’’Appel chéri’’ à ’’Iyalodé’’, en passant par ’’En aparté 1’’, ’’Agban-non’’ – et non ’’Agbonnon’’ –, ’’Guèlèdè party’’, ’’Olowo yaléma’’, ’’En aparté 12’’, ’’Fleuriel’’, ’’La télé rend fou’’, ’’En aparté 13’’, ’’Akou’’, ’’Jazz club’’, ’’L’œil de Dieu’’, ’’Méditations’’, ’’Awobobo 1’’, ’’Awobobo 2’’, ’’Cycliste performer’’ et ’’Babalao’’, sans oublier l’installation mosaïque incorporant les toiles de petit format, ’’En aparté 2-11’’. Ce sont les tableaux au niveau desquels Rafiy projette un système visuel qui accapare ; ces œuvres relèvent de son inspiration des années 2016, 2018 et de l’actuelle, 2019. Des toiles du renouveau d’une démarche artistique qu’il exerce, apparemment, depuis son installation en France en 2012.


Du ’’Rapace purificateur’’

En dehors du pinceau qu’il manipule avec dextérité, avec aisance, avec une assurance conquise, Rafiy, de ses doigts, ramasse, assemble, rassemble, fabrique, crée. Ainsi, le ’’Rapace purificateur’’, une sculpture appartenant à l’exposition ’’Mots magiques’’. 

Le ''Rapace purificateur''
Un oiseau d’expansion de bien de sentiments nobles qui rendent la vie plaisante, qui l’épanouissent de ses couleurs les plus variées, à l’instar de l’aile droite du ’’Rapace’’ vu de dos ; elle est un appareil constitué à partir de plusieurs couleurs d’éventails en plastique, bien propres, brillants de leur caractère neuf : « Cette aile dispense du bonheur, de la sérénité, de la paix, des sentiments qui entretiennent l’harmonie entre les hommes », dévoile Rafiy. Dans le même temps, l’aile gauche, comme par un choix bien mûri, débarrasse la terre de toutes les pulsions noires, de tous les déchets moraux qui poussent l’homme à la nuisance, de tout ce qui entrave le développement du pays, du continent, ce qui justifie la sélection des matériaux ayant aidé à la fabrication de cette aile : des résidus de toutes sortes et, notamment, des couvercles sales de boîtes de lait, l’ensemble rangé dans un filet.
Voilà un oiseau, tout de fer, qui, lorsqu’il est censé s’envoler, joue deux rôles complémentaires, absorber les maux et répandre les vertus. Rafiy, dans son engagement à produire un impact sur la société, par son art, ne s’en arrête pas à cette inspiration.


’’Maison de survie’’

Une oeuvre de sensibilisation. Pour l’artiste, la question de l’immigration, clandestine, surtout, est cruciale, vu que les candidats à cette aventure, très nombreux, à notre époque, en sont ignorants du fonctionnement catastrophique : « Il y en a beaucoup qui ne savent pas ce qui les attend quand ils veulent aller clandestinement en Europe », précise Rafiy. 

''Maison de survie''
Dans le but de proposer une idée des souffrances inconnues de la situation de ce type d’immigration, il a conçu ’’Maison de survie’’, ce qui donne lieu à une installation dans l’exposition ’’Mots magiques’’ ; elle préfigure la situation tragique des migrants aux frontières européennes : « Ils sont soumis au froid, à la neige, surtout, à Calais ; ’’Maison de survie’’ représente la tente qu’utilisent les migrants vers l’eldorado, ils la mettent au point pour tenir le coup contre les intempéries, le temps qu’un brèche s’offre pour qu’ils échappent à la police et entrent en Angleterre.   


Déambulation

Apparemment, Rafiy a voulu faire de la pierre ’’Mots magiques’’ plusieurs coups. Vêtu d’une sorte de combinaison rouge, affublé d’un chapeau de la même couleur et arborant un masque à oxygène, ses chaussures aussi étant rouges, il se meut dans le public des visiteurs, à l’aide d’un vélo surmonté d'un panier, et distribue à la ronde un carré de papier en carton en demandant, d’une voix sourde, peu audible, que chaque récepteur qu’il a muni d’un pastel y inscrive un mot. Par rapport au rouge, il se justifie : « J'aime le rouge, c'est la couleur commune à tous les hommes par le sang ». 

Rafiy, en déambulation
Le mot choisi doit être celui que chacun pense pouvoir lui faire du bien, produire cet effet sur son pays et, enfin, sur son continent : le « mot magique », à en croire Rafiy Okéfolahan. Après avoir collectionné ce type de mots, pendant un certain temps, il entend en faire une exposition. Sa vision : fédérer autour de lui le plus de mots possible qui puisse contribuer à créer partout une ambiance de paix, avec son pays, le Bénin, traversant une impasse électorale. « Il m’importe de sauver quelque chose qui se perd », commence-t-il, « peut-être la démocratie, les vraies valeurs comme le travail bien fait, l’absence de détournement des deniers publics, le patriotisme, l’abondance de travail pour que le pays aille de l’avant », a-t-il conclu. Les ’’Mots magiques’’ est une exposition qui se clôt le samedi 30 mars 2019.

Marcel Kpogodo

vendredi 21 novembre 2014

Rafiy Okéfolahan et Charly Djikou, deux valeurs sûres de l’art béninois

Ils réalisent l'exposition ’’Hwenuxo’’ au ’’Centre’’ de Lobozounkpa


Le vernissage de l’exposition ’’Hwenuxo’’ s’est déroulé le jeudi 13 novembre 2014, en début de soirée, au complexe culturel dénommé ’’Le Centre’’, situé à Lobozounkpa, dans la Commune d’Abomey-Calavi. La manifestation a permis de faire découvrir au public des œuvres, créées sur place, des deux artistes exposants, Rafiy Okéfolahan et Charly Djikou, chez qui il ne fait l’ombre d’aucun doute de l’existence d’un talent leur réservant une carrière explosive.


Rafiy Okéfolahan, à gauche, et Charly Djikou, à droite
Les grandes allées du ’’Centre’’ balisées par des lanternes allumées, de quoi orienter les visiteurs. Ce contexte chaleureux a permis à un grand nombre de personnes, parmi lesquelles des artistes, des connaisseurs de l’art plastique, des journalistes et des curieux, de participer au vernissage de l’exposition ’’Hwenuxo’’, le jeudi 13 novembre dernier, à Lobozounkpa, le quartier de la Commune d’Abomey-Calavi où se situe ’’Le Centre’’.
Prévue pour durer deux mois, cette exposition est le résultat de 30 jours de travail, à travers une résidence de création, de la part de Rafiy Okéfolahan, artiste plasticien, et de Carly Djikou, sculpteur spécialisé dans la pierre. Ceux-ci semblent ne pas avoir ménagé leurs efforts, ce qui a laissé à la dégustation visuelle des visiteurs, du côté de chacun des artistes, un peu moins d’une vingtaine d’œuvres.
Selon le premier, ’’Hwenuxo’’ signifie ’’événement’’, l’histoire vécue avec le lieu de la résidence de création. Et, justement, celle qu’il a choisie de narrer par ses tableaux, réalisés au moyen de l’acrylique sur toile, est celle, tragique et préoccupante, de ce qu’il a nommé « Les kamikazes urbains » qui ne sont personne d’autre que les transporteurs d’essence frelatée, de même que ceux qui en assurent la vente, au bord des routes du Bénin. Un regard profond, d’un tableau à l’autre, au travers des couleurs vives et rayonnantes, laisse percevoir la silhouette de ces déshérités qui, fortement, croient qu’ils n’ont pas d’autre choix, pour vivre, que de mener cette activité dangereuse. Et, pour appuyer cette action de réprobation de cette vision fataliste qu’il réprouve, Rafiy Okéfolahan, d’une part, a émis une installation suggestive, ’’Waba oil building’’, faite d’un pilier vertical construit à partir de bidons et de bouteilles en plastique, comme pour symboliser le matériel de travail de ces ’’kamikazes’’ ; ce pilier héberge, presqu’en son centre, une vidéo, profondément alarmante, déroulant le film macabre de la tuerie orchestrée, en série, par la manipulation approximative, peu précautionneuse, périlleuse et maladroite du produit inflammable qu’est l’essence, par des personnes qui, en réalité, ne sont pas techniquement préparées à cela. D’autre part, il a fait réaliser un graffiti sur l’un des murs latéraux de clôture du ’’Centre’’ : un conducteur de taxi-moto, encombré de bidons d’essence, attachés à son porte-bagages. Cet acte d’insistance artistique témoigne de la forte préoccupation par l’artiste pour cette question de l’écoulement de l’essence frelatée. 
Par ailleurs, la convergence des inspirations a laissé les deux artistes exposants combler le public d’une œuvre collective : ’’Bobo’’.
Charly Djikou, lui, matérialise plus de vingt ans d’expérience, dans son domaine de la sculpture sur pierre, par une série de sculptures réparties dans les salles d’exposition du ’’Centre’’ ; elles sont, soit en granite, soit en marbre. A travers elles, lui qui porte comme fait d’arme essentiel d’avoir réalisé la statue de Toussaint Louverture à Allada, il choisit, en guise de ’’Hwenuxo’’, de relater le quotidien de la vie de l’homme, d’où des titres assez indicatifs : ’’J’observe’’, ’’Les trois amis’’, ’’Les larmes de la pierre noire’’, ’’Le couple’’, ’’La grande gueule’’, ’’Akowé’’, ’’Sêdjinnasso’’, notamment. A en croire les propos de cet autodidacte persévérant, ces fruit si délicieux pour le regard et l’esprit résultent de l’exploitation de la pierre en provenance de plusieurs localités du Bénin : Abomey, Dan, Dassa, Lokossa, ce qui n’est guère facile, surtout qu’il lui faut se protéger, lors de son travail sur ce matériau, contre les tessons, les morceaux de pierre pouvant percer la peau, contre la poussière, entre autres, de même qu’il doit se vêtir particulièrement en portant un protecteur d’oreilles, un cache-nez, des gants, une chemise de manche longue, et qu’il doit s’armer de burin, de marteau, de meule électrique, notamment.

Les artistes Charly Djikou et Rafiy Okéfolahan, échangeant avec leurs visiteurs du Complexe scolaire "La plénitude"
Il faudrait donc s’intéresser davantage à Rafiy Okéfolahan et à Charly Djikou, ces deux artistes d’une démarche et d’une inspiration avérées, dont les autorités d’un complexe scolaire de la place, dénommé ’’La plénitude’’, se sont déplacées pour voir les œuvres si remarquables, un fait de certitude que, sous peu, une certaine jeune pousse ne manquera pas d’emboîter à ces deux génies d’artistes, peu considérés au Bénin. 

Marcel Kpogodo

samedi 1 juin 2013

Grâce au Projet d'appui à la Filière des arts visuels au Bénin

Le Répertoire des acteurs des arts visuels au Bénin désormais disponible

Un document très important dans le secteur des arts plastiques au Bénin vient d'être publié ; il s'agit du "Répertoire des acteurs des arts visuels au Bénin". Il a été lancé le jeudi 30 mai dernier, à l'auditorium de l'Institut français de Cotonou, devant bon nombre de personnalités dont le premier responsable de la Culture au Bénin.   

Page de couverture du "Répertoire"
12 Départements du Bénin, pour 179 artistes plasticiens, 5 historiens de l'art, 14 journalistes culturels, 7 collectionneurs, 30 associations culturelles, 31 centres d'art, galeries, lieux d'exposition ou de promotion, et 9 musées. La statistique globale que révèle le document intitulé "Répertoire des acteurs des arts visuels au Bénin", lancé le jeudi 30 mai 2013, en présence de Jean-Michel Abimbola, Ministre de la Culture, Sylvain Treuil, Directeur de l'Institut français de Cotonou, Ghislain Bidossessi Fandohan, Coordonnateur à la fois de l'Association béninoise des arts plastiques (Abap-Four P) et du Projet d'Appui à la filière des arts visuels au Bénin (Pafav-Bénin), Babacar N'Diaye, Représentant du Coordonnateur du Programme "Société civile et culture" (Pscc), des membres du Cabinet du Ministre de la Culture, de plusieurs personnalités du monde des arts au Bénin, tels le Professeur Joseph Adandé et Tola Koukoui, metteur en scène reconnu, et d'un nombre impressionnant d'artistes plasticiens.


Ghislain Bidossessi Fandohan, la tête pensante du "Répertoire", cette initiative salvatrice 

Le document pour lequel toutes ces personnalités de poids se sont déplacées est un volume de 275 pages, embellies, chacune, par la photo de l'artiste plasticien exploré qu'appuie une biographie synoptique et au moins deux photos d’œuvres dont il est l'auteur. D'un feuilletage et d'une consultation aisés, ce "Répertoire" réjouit le regard, mettant en valeur un certain savoir-faire graphique. Il se termine, en annexe, par une carte des espaces culturels répartis à travers le Bénin. Un bijou qui est un véritable trésor pour les spécialistes du domaine des arts plastiques, pour les chercheurs, qui voudraient maîtriser, par leurs investigations, la sphère béninoise. Un tel document devrait inspirer les acteurs des autres secteurs de la culture, où, souvent, l'on se plaint beaucoup des acteurs fictifs et nuisibles. Voilà une stratégie, celle du Fafav, qui devrait les aider à faire l'état des vrais acteurs et à éjecter les usurpateurs. Ce bijou est une voie d'assainissement qui ne dit pas son nom, tracée pour tous les autres secteurs de la Culture.    

Jean-Michel Abimbola, Ministre de la Culture
Entre les allocutions respectives de Ghislain B. Fandoahn, de Rafiy Okéfolahan, Président de l'Association "Elowa", ayant apporté une partition décisive à la constitution du Répertoire, du Professeur Adandé, de Sylvain Treuil, de Babacar N'Diaye et, enfin, du Ministre de la Culture, le site web du répertoire a aussi été porté à la connaissance du public : www.beninartsvisuels.com. Rappelons que ce document stratégique qu'est le Répertoire succède aux deux catalogues Harmattan,  réalisés, d'abord, par l'ex-Centre culturel français, et à celui de l'Association "Elowa", conçu à l'issue du Projet "Waba", de l'année 2010. Le "Répertoire des acteurs des arts visuels au Bénin" se révèle comme prenant en compte largement beaucoup plus d'artistes plasticiens. Il se complète, en outre, par d'autres composantes comme les historiens de l'art, les journalistes culturels, les collectionneurs, les associations culturelles et les galeries, notamment. Un grand pas donc de l'Association Abap-Four P dans la constitution d'une riche base de données livresques et numériques dans les arts visuels, exploitables par tous.


Marcel Kpogodo  



Les impressions du Coordonnateur Ghislain Fandohan :

" Je dirai simplement que c'est un sentiment de joie qui m'anime puisque nous venons de franchir un pas, de relever un défi mais, il reste encore beaucoup d'autres qui nous attendent. C'est déjà bien qu'on soit un peu déchargés de ce Répertoire, après son lancement ; il ne restera que sa distribution dans tous les Départements de notre pays. Et, avec cela, nous sommes très heureux d'avoir lancé officiellement ce Répertoire qui sera distribué, dès demain, aux artistes plasticiens, aux associations, aux espaces culturels, aux collectionneurs, aux journalistes culturels recensés et aux historiens de l'art qui y sont.

Pouvez-vous parler très brièvement du processus qui a permis d'aboutir à ce répertoire? 

C'est un long processus qui a commencé par le recensement qui a été réalisé dans tous les Départements de notre pays, comme on l'a dit, et cela n'a pas été facile. de demander, de revenir réclamer des informations. Mais, les artistes, par leur patience, ont contribué, du début jusqu'à la fin. Au terme de ce recensement, nous avons réalisé le Répertoire qui est l'outil de promotion pour ces acteurs recensés, de même que la mise en ligne de ce Répertoire, sur le plan international.

On a entendu dire que certains artistes n'ont pas été pris en compte ....

On a fonctionné selon le Statut de l'Artiste, en vigueur dans notre pays, où il y a trois catégories d'artistes : les professionnels, les semi-professionnels et les amateurs. Le recensement a pris en compte les trois catégories, ce qui fait que le chiffre de 268 les concerne. Mais, pour le Répertoire qui est un outil de communication et de promotion, qui sera distribué dans notre pays et au-delà de nos frontières, nous avons jugé, sur consultation des personnes ressources et des membres du Comité technique qu'on a constitué à cet effet, de ne retenir que les artistes professionnels et les semi-professionnels dans le Répertoire, ce qui a fait que le nombre a été réduit à 179. Mais, sur le site Internet, nous trouverons toutes les catégories puisque, les amateurs, en tant que tels, sont de la catégorie des artistes plasticiens et ils font partie des statistiques.

Après la clôture du Pafav-Bénin, quelle est l'étape suivant à laquelle il faut s'attendre ?

Déjà, au cours de ce Projet, nous avons soutenu les lauréats de Prom'arts Jeunes. En août-septembre, nous prévoyons une exposition internationale pour les artistes de notre pays, avec les artistes de la sous-région.; huit pays de l'Afrique seront invités : le Bénin, le Togo, le Ghana, la Côte d'Ivoire, le Nigeria, le Burkina Faso, le Mali et le Niger. C'est pour rompre avec la monotonie, puisqu'à chaque exposition, dans notre pays, on ne voit que les mêmes artistes. On veut faire voir au public, à nos populations, de nouvelles créations d'artistes béninois mais, aussi, étrangers, pour permettre aussi aux artistes béninois de voir autre chose et de se comparer aux artistes de la sous-région, qui sont aussi leurs promotionnaires."

Propos recueillis par Marcel Kpogodo 

mercredi 8 mai 2013

Ishola Akpo, avec "Le reflet du ciel", au Password art video international (Pavi)

Retour sur une oeuvre vidéo de poids

Le mercredi 1er mai dernier a permis au public de découvrir la restitution de la résidence de formation en art de la vidéo, tenue à la Place du Souvenir de Cotonou, sous l'initiative de l'Association "Elowa" de Rafiy Okéfolahan, qui, d'ailleurs, a conçu et conduit cet atelier, du 15 au 30 avril 2013. Parmi les neuf vidéos qu'il a été donné aux personnes présentes de visualiser, l'une se détache résolument, celle d'Ishola Akpo : "Le reflet du ciel".

Produite sous le couvert du Password art video international (Pavi), projet initié par l'Association "Elowa", la vidéo intitulée, "Le reflet du ciel", manifeste une particularité patente ; il s'agit d'une performance dans laquelle l'auteur, Ishola Akpo, s'auto-met en scène, de façon à vivre par lui-même les réalités philosophiques liées à l'eau dont son inspiration lui imposait de communiquer la teneur.


Les étapes d'un processus photographique inédit de communion avec le soleil, l'air et l'eau, en synergie spontanée avec l'Homme, le dompteur

C'est un mouvement fulgurant de l'eau qui se déverse sur sa face baignant apparemment dans un soleil qui transforme en or tout ce qu'il trouve sur son passage. Invité à expliquer la teneur de cette lumière de mise en synergie entre la nature, le soleil, l'eau et l'Homme, Ishola se fait précis : " "Le reflet du ciel", c'est le message de l'eau qui est vitale pour l'homme ; elle désaltère, nettoie, transforme, sculpte le paysage, celui des corps et ceux du monde. Elle est uniforme, tout en épousant la forme de ce qui la contient. "

Ishola Akpo, le jeune génie de cette inspiration défiant la routine artistique ambiante
Sur le fondement de cette "foudroyance" en mouvement sur la vidéo, il continue : " Les nuages, la vapeur ou la glace nous inspirent ; l'eau est à la fois une denrée rarissime et très convoitée. Ainsi, "Le reflet du ciel" pose la question de l'utilisation de l'eau, très inégalée dans le monde, selon qu'on soit du Nord ou du Sud". Voilà une nouvelle oeuvre qui capitalise déjà les analyses de tous bords des spécialistes avérés et qui vient enrichir le patrimoine de l'art de la vidéo, toute naissante au Bénin.

Marcel Kpogodo

dimanche 5 mai 2013

Restitution de la résidence du Pavi à Cotonou

9 artistes de la vidéo projettent une inspiration spécifique

La soirée du 1er mai 2013 a donné lieu à une effervescence particulière à la Place du Souvenir de Cotonou. Le moment qu'ont choisi neuf stagiaires vidéastes de quatre nationalités différentes pour partager le fruit de leurs échanges professionnelles d'une bonne quinzaine de jours sur l'art de la vidéo, à l'initiative de l'Association "Elowa", dirigée par l'artiste Rafiy Okéfolahan. Les artistes, en fin d'atelier, ont permis au public de se régaler de projections révélant la fécondité particulière de chacun d'eux.

Neuf œuvres vidéo, de quelques secondes chacune, ont constitué un véritable élément de fascination. C'était au niveau du couloir de jonction des deux voies goudronnées passant de part et d'autre de la Place du Souvenir, lieu de circonstance d'exposition. Il a servi de cadre, le mercredi 1er mai 2013, en début de soirée, à la restitution vidéo de quinze jours de travaux d'atelier auxquels ont participé six artistes vidéastes béninois, un, togolais, un autre, malien et, un autre encore, camerounais. 

Une ambiance d'atelier
Autant qu'ils sont, leur parcours montre qu'ils ne sont pas nés de la dernière pluie, d'abord, en matière d'art plastique et, ensuite, dans le domaine de la vidéo d'art. Ce sont, respectivement, Rafiy Okéfolahan, Ishola Akpo, Mathieu Adjèran, Thierry Oussou, Totché, Dina, Eza Komla, Kôké et Kajéro. 
Rafiy Okéfolahan, observant le déroulement ...

Sous le couvert du Projet dénommé Password art vidéo international (Pavi) 2013, ils ont enrichi leurs connaissances en suivant cinq modules bien précis : la prise de vue, le montage virtuel, l'écriture de scénario, l'analyse critique du récit littéraire et filmique, et l'art vidéo. 

.... des projections
Selon Rafiy Okéfolahan, Président de l'Association Elowa, qui a eu et concrétisé l'idée de cette formation, l'atelier, s'étant déroulé du 15 au 30 avril 2013, a consisté à focaliser l'attention des participants sur les tenants et les aboutissants de l'art vidéo, en ce qui concerne son histoire et les différentes techniques qui lui sont liées. Il a précisé qu'à l'issue du processus des échanges entre les neuf artistes, chacun d'eux a conçu une vidéo d'art, ce qui, d'ailleurs, faisait l'objet de l'exposition. Par la suite, ces productions seront gravées sur un support DVD et diffusées à partir d'autres sites précis de la ville de Cotonou. Cette expérience, inévitablement, fait ressortir l'humilité des stagiaires et leur volonté de partage et de communion professionnelle et artistique avec l'autre. Une humilité qui a généré des vidéo de génie, dans une spécificité et une variété enrichissantes d'inspiration.

Marcel Kpogodo


Impressions des artistes présents et d'Elise Daubelcour

Présents à l'exposition de restitution, la plupart d'entre eux ont accepté de se prêter au jeu d'explication de leur oeuvre.

Ishola Akpo, avec Le reflet du ciel : "Je m'adapte à toute chose, parce que, d'abord, l'eau prend forme à partir de ce que vous lui donnez, à partir de la couleur que vous lui donnez, l'eau prend forme à partir de ces éléments-là. Donc, pour moi, l'eau est un élément important dans la vie de l'homme, qui peut être aussi un élément de bonheur et aussi un élément destructeur ; je suis comme l'eau, je m'adapte, je peux être aussi ouvert, comme je peux montrer mon côté négatif comme mon côté positif ; je pense que tout être humain est pareil, il peut montrer son bon côté comme son mauvais côté. 
Donc, "Le reflet du ciel', c'est aussi, toujours parlant de l'eau, c'est une source naturelle qui nous vient du ciel, d'où le nom "Reflet du ciel". Mais, la vidéo que j'ai présentée est une vidéo-performance. C'est parce qu'on n'a pas eu assez de temps, sinon, j'allais faire cette performance. La performance est une forme théâtrale que l'artiste monte avec un sujet bien élaboré. Là, comme on ne devait pas avoir assez de temps, j'ai demandé à être dans ma vidéo ; au lieu d'aller filmer les autres, moi, je me suis mis sur la scène et, face à la caméra, pour exprimer mon idée. Donc, voilà un peu la particularité de ma vidéo ; vous m'y voyez avec une source d'eau quitte là-haut et me tombe dessus ; c'est une vidéo-performance. 


Dina, avec De l'ombre à la lumière : "Je veux mettre la lumière en valeur à travers l'ombre. C'est pour dire que, de la façon dont on voit l'ombre, ce n'est pas forcément ça. L'ombre, c'est la nuit qui nous fait voir la valeur du jour, c'est nos échecs qui nous poussent à rechercher la réussite. C'est un peu ça : dans ma vidéo, on voit apparaître une faible lumière qui bouge dans du noir, dans de l'obscurité carrément. Je peux dire aussi que j'aime beaucoup la spiritualité et que je travaille beaucoup là-dessus. Même dans toutes mes œuvres, j'essaie de me rapprocher un peu de la spiritualité.


Totché, avec Chacun a ses chances : Cette oeuvre invite toute la jeunesse d'Afrique, notamment, la jeunesse béninoise, à se mettre au travail, d'abord, et, après avoir acquis, les connaissances, les bases nécessaires qu'il faut, de se lever, avec courage, avec détermination, et de taper à toutes les portes. Dans la vie, j'ai remarqué qu'il y a un symbole très fort, chez nous, à la base : quand tu arrives chez toi, tu ouvres une porte d'abord avant d'entrer dans ta chambre et, quand tu sors, tu la fermes. Donc, il y a ce système d'ouvrir et de fermer. Et, la vie aussi, c'est ça ; quand on tape à une porte, l'intéressé qui est à l'intérieur peut choisir de ne pas ouvrir, comme il peut ouvrir. Aujourd'hui, la jeunesse, après avoir acquis toutes les connaissances, toutes les capacités pour construire sa nation, doit se lever et aller taper à toutes les portes ; quand une ne s'ouvre pas, il y a l'autre qui va s'ouvrir. Dans la vidéo, j'ai pris l'exemple des enfants parce que, aujourd'hui, nous, on a un âge donné et, on doit
dire aux jeunes, aux enfants de prendre conscience et connaissance de cela pour ne pas venir, un jour, à la dépravation.

Thierry Oussou, avec La protection : Au fait, je parle de la protection dans tous ses sens ; j'ai utilisé, comme matière, la bague ; le port de la bague procure beaucoup de choses, on peut porter la bague pour se protéger mystiquement, et aussi, pour se protéger contre l'infidélité. Donc, c'est dans ce sens que j'ai essayé de traiter ma vidéo". 

Rafiy Okéfolahan, avec Waba : " "Waba", c'est ce qui est accessible ; j'ai fait le constat que les vendeurs et les transporteurs d'essence ont l'habitude de nous inviter à venir acheter leur produit avec des slogans comme "Waba ! C'est accessible, venez, c'est moins cher !" Et, dans mes analyses, j'ai compris que leur vie, de la manière dont ils passent à la mort est aussi Waba ! C'est aussi très facile, parce qu'il suffit que le bidon d'essence, qu'ils transportent d'un point à un autre, explose pour qu'ils perdent la vie ; c'est ça que j'ai voulu montrer. Je voulais aussi toucher le côté selon lequel le trafic d'essence est tellement enraciné qu'il occupe une grosse part dans l'économie, c'est le cœur ; quand on essaie d'interrompre le trafic d'essence, tout va au ralenti". 


Mathieu Adjèran, avec The way : " "The way", c'est le chemin ou la voie ; c'est une invite à chacun pour qu'il écoute la voix de sa voie, c'est-à-dire que, dans la vie de chacun, à un moment donné, on est appelé à prendre une voie. Et, cette voie, quelle qu'elle soit, demande forcément un sacrifice. L'inspiration me vient d'une légende du Fâ sur la voie, qui voudrait que, sur n'importe quelle voie sur laquelle on s'engage, pour aboutir, il faut se sacrifier, il faut un sacrifice. Dans ma vidéo, vous verrez que tous ceux qui s'engagent sur une voie n'y vont pas au bout ; à un moment donné de leur cheminement sur la voie, on les perd. C'est pour symboliser qu'il est beaucoup qui s'engagent sur des voies mais, très peu y vont au bout, parce que, sur chaque voie, il y a un sacrifice et, beaucoup n'arrivent pas à supporter ça. Je vous prends le cas du journaliste culturel que vous êtes : vous êtes les moins nantis dans la corporation encore des journalistes . Donc, il y a très peu, sûrement, qui se sont engagés un jour comme journaliste culturel mais, aujourd'hui, ce peu continue. Dans ma vidéo, beaucoup s'engagent sur une voie mais peu en arrivent au bout, au beau milieu, on les perd. A un moment donné, quand vous regardez ma vidéo, on voit une voie presque vierge, de la broussaille. C'est pour dire qu'aucune voie n'est assez comble, n'est assez vieille pour qu'on ne s'y engage pas. En réalité, toute voie est toujours vierge pour qui veut s'engager vraiment. A la fin, j'ai mis : "Find yours ...", pour dire : "Trouve la tienne et va jusqu'au bout ; sûrement, cela va te demander des sacrifices mais, quand tu vas jusqu'au bout, tu deviens champion et, même les gens qui avaient voulu te dérouter hier viendront t'applaudir, t'acclamer, parce qu'ils verront que tu es un champion. Donc, trouvons notre voie, suivons-la, acceptons les sacrifices nécessaires que cette voie va nous demander. Donc, la voie aussi comme option, comme vie, comme engagement ... Quand tu choisis ta voie, ça devient un engagement".

Eza Komla, artiste togolais, avec une vidéo sans titre : "Je suis venu ici dans le cadre d'un atelier vidéo et, l'oeuvre que j'ai créée n'a pas de titre. J'ai travaillé spécialement sur l'eau. Dans mon oeuvre, j'ai parlé un peu de l'illusion que le commun des mortels a en disant qu'on a de l'eau en abondance, alors qu'au fin fond, l'eau est très rare. A l'allure où vont les choses, la plupart des grands dirigeants de ce monde disent que la troisième guerre mondiale, c'est la guerre de l'eau. J'ai créé ma vidéo tout en me référant aux résidences d'étudiants, à l'Université d'Abomey-Calavi. On voit que, dans leur baignoire ou dans leur douche, il y a un peu de gaspillage de cette eau, parce qu'on a cette impression qu'on a de l'eau en abondance, et le commun des mortels en abuse en la gaspillant. Et là, vous voyez dans la salle de bain de ces étudiants, il y a des robinets endommagés, l'eau coule abondamment des robinets ; dans des coins de l'université, ils restent ouverts et l'eau sort ! Donc, mon travail tourne autour du gaspillage".

Kôké, artiste malien, avec A la recherche de l'abondance : "Individuellement ou collectivement, tout être humain, tout pays, tout continent, tout le monde cherche, cherche, cherche le progrès, l'abondance. Donc, individuellement, quand on regarde la vidéo, on a l'eau, la mer, le chapelet en cauris. L'eau est source d'abondance, elle est la source de vie, tout vient de l'eau, tout part de l'eau. Quant au chapelet, il est une source de l'exhortation de Dieu, pour demander à Dieu de me donner des lendemains meilleurs. Les cauris, c'est l'abondance, la richesse, c'est la première monnaie de nos ancêtres ; quand tu avais assez de cauris, ça voulait dire que tu étais riche. Donc, finalement, l'homme est à la recherche de l'abondance jusqu'à ce qu'on arrive à un moment, dans la vidéo, où le chapelet se transforme en famille : sans elle, on n'a pas le bonheur ; le chapelet se transforme en cœur : sans amour, il n'y a pas de progrès ; sans l'amour de la patrie, de la nation, nos dirigeants ne peuvent pas développer nos patries, nos nations. Après le cœur, le chapelet se transforme en une carte de l'Afrique: le jour où les dirigeants, où les citoyens africains aimeront leur pays, ce jour-là, on va se développer. Donc, il faut l'amour de nos patries, il faut chercher, chercher et chercher, tomber et chercher ; je me dis que l'Afrique est en train de bouillonner, de se chercher mais, quand est-ce qu'on aura cette abondance-là ? Donc, la vidéo, c'est ça, en quelque sorte : tout vient de l'eau, tout revient à l'eau ; même scientifiquement, le monde est venu de l'eau, quand l'eau disparaîtra, le monde va partir. Religieusement, la fin du monde est avec l'eau, c'est l'eau qui va sortir des montagnes, du sol, pour engloutir la terre. Tout vient de l'eau, l'eau est source de vie, d'abondance. Et puis, chacun est libre d'interpréter cette vidéo comme il le veut".       

Elise Daubelcour : "Par rapport à la restitution de l'atelier vidéo, je pense que c'est une bonne chose qu'il puisse y avoir des initiatives de ce genre, ici, à Cotonou et puis, généralement, au Bénin. On avait vu qu' "Unik" (Complexe culturel de Dominique Zinkpè, Ndlr) avait fait, à l'époque, avec la Fondation "One minute" un atelier du même genre et que cela a pu se poursuivre avec des associations comme "Elowa", avec Rafiy, je trouve que c'est très bien, ça ne peut être que bénéfique pour les artistes, surtout que l'art de la vidéo n'est pas très répandu ici.    

Propos recueillis par Marcel Kpogodo

mardi 18 septembre 2012

Biennale Bénin Bénin 2012

Le Collectif "Nudowa Yôyô" lance un cri de protestation : "Biennale Bénin Bénin 2012"

"Je ne conçois pas que l'artiste puisse rester un spectateur indifférent, refusant de prendre une option ... Etre engagé, cela signifie pour l'artiste, être inséré dans son contexte social, être la chair du peuple, vivre des problèmes de son pays avec intensité et en rendre témoignage." Se retrouvant profondément en phase avec cette réflexion d'Aimé Césaire qui, selon eux, rend amplement compte des fondements de l'initiative du Collectif "Nudowa Yôyô" qu'ils ont mis en place, les cinq artistes plasticiens béninois que sont Rafiy Okéfolahan, Marius Dansou, Benjamin Déguénon, Kajero et Totché, créent leur propre Biennale d'Arts, dénommée "Biennale Bénin Bénin 2012" ; elle est prévue pour se tenir du 7 novembre 2012 au 14 janvier 2013. Leur programme, à cet effet, est bien clair : réaliser une performance, organiser des rencontres, des discussions et tenir des expositions, durant toute la période évoquée. Ils annoncent avoir un site Internet en construction et disent détenir une liste ouverte à tous les artistes qui aiment l'art ; il n'y aurait pas de conditions financières préalables à remplir pour cette inscription. Ainsi, la Biennale "Bénin Bénin 2012" constitue leur cri de vigoureuse protestation contre ce qui se profile à l'horizon : la tenue de deux Biennales, à partir du 08 novembre 2012, celle dénommée "Consortium Regard Bénin" dont Dominique Zinkpè est le Président, et "Regard Bénin", dirigé par le non moins connu, Ousmane Alédji, de l'Association ''Regard Bénin". 

La bannière de la Biennale "Bénin Bénin 2012" du Collectif "Nudowa Yôyo"
Selon Rafiy Okéfolahan, la question qu'il faudrait se poser, face à cette division qui menace la bonne tenue et l'existence future de la Biennale tout court, est de savoir si on fait de l'art pour le ''Dan-mi'' ou pour la passion, le ''Dan-mi'' dont le sens est, à en croire l'intervenant, le trésor de l'arc-en-ciel, en plus clair, les financements importants qui sont annoncés pour pleuvoir sur les organisateurs. 
S'exprimant au nom du Collectif "Nudowa Yôyô", il explique que cette initiative vise à dénoncer cette double Biennale qui n'aura d'autres conséquences que de ridiculiser le Bénin au plan international, si ce n'est déjà fait, de le décrédibiliser et de faire fuir les partenaires qui sont annoncés pour financer cette événement qui se trouve à sa deuxième édition. 
Marius Dansou, très révolté aussi, appelle à ce que les deux camps se comprennent au plus tôt afin de sauver la Biennale, de réussir sa tenue et de garantir sa pérennisation, ce qui le pousse à crier : "Nous voulons notre Biennale pour 2012 et pour toutes les autres éditions !" Dans le cas contraire, "Bénin Bénin 2012" aura lieu, ce qui créera davantage d'imbroglio, un fait qui ne déplaît guère à Benjamin Déguénon, pour qui, le Collectif n'a pas trouvé nécessaire de rencontrer le Ministre de la Culture, vu les tracasseries administratives que cela suggère, ni de chercher à réconcilier le chef de file de chacun des deux groupes proposant un programme différent pour la Biennale, surtout que chaque camp reste accroché à sa position, la préoccupation du groupe étant que la Biennale se tienne pour que les artistes pour qui elle a été conçue puissent montrer leurs œuvres et faire apprécier leur talent. 
Vivement une force au-dessus de la mêlée qui réussisse à rétablir l'ordre dans l'organisation de la Biennale, une situation contraire qui compromettrait une manifestation culturelle de grande envergure prévue pour promouvoir la culture contemporaine béninoise. 

Marcel Kpogodo

mercredi 25 janvier 2012

"Elowa" innove avec "L'Un dans l'Autre" à Cotonou

Restitution de résidence artistique


Le Bénin et la France, l'Un dans l'Autre

Des artistes béninois et bellevillois en symbiose artistique.

La banderole de la résidence de création ...


Voilà le fondement d'une exposition qui s'est déroulée le dimanche 22 janvier dernier, à "Unik-lieu de création contemporaine", l'atelier de l'artiste-plasticien, Dominique Zinkpè, de Fidjrossè à Cotonou : le résultat de plusieurs jours de résidence, de travail en commun entre ces deux groupes d'artistes venus de deux horizons francophones, sous la férule de l'Association Elowa et, dans le cadre de Waba 2012. Cette exposition a été lancée en présence de nombreuses personnalités, notamment, de Rémi Secret, Directeur adjoint de l'Institut français du Bénin, et de plusieurs artistes.



"L'Un dans l'Autre": c'est le thème ayant donné naissance à environ une quarantaine de pièces jalonnant les murs d'exposition de l'Atelier Unik-lieu de création contemporaine de l'artiste-plasticien béninois, Dominique Zinkpè, situé dans le quartier cotonois de Fidjrossè.


L'installation inaugurale de l'exposition ...


Ces tableaux, de toutes dimensions et de toutes couleurs, ces sculptures, ces installations, ces carnets de route, de voyage, ces vidéos, sont le résultat de trois jours fermes de résidence de création collective entre des artistes béninois et de la ville française de Belleville.


Quelques carnets de route réalisés ....



Une sculpture de création collective ...


D'un côté, Philippe Abayi, Aston, Benjamin Déguénon, Marius Dansou, Grek, Kajéro, Romuald Mèvo-Guézo, Zansou et Dominique Zinkpè, ont communié avec Guillaume Berga, Marie Busson, Sarah Dugrip, Nicolas Dupeyron, Wallon-Leducq, Catherine Olivier et Quentin, de l'autre, ce qui a eu pour résultat de mettre à la disposition du public des productions relatant un partage de méthodes, de stratégies, d'expériences artistiques, et de fusion des inspirations, du jeudi 19 au samedi 21 janvier.


Au lancement de l'exposition ...


Des étapes bien huilées

Nous en sommes à la première phase du projet Waba, mis en place par l'Association Elowa ; elle suppose qu'en janvier 2012, des artistes français de Belleville fassent le déplacement vers Cotonou pour visiter des ateliers de leurs homologues béninois, habitant la capitale économique et Porto-Novo, notamment, et pour travailler avec eux.


Kajéro, ayant participé à la résidence ....


Ce volet a été atteint, vu que, arrivés à Cotonou le 08 janvier, les sept artistes bellevillois ont effectué une première visite d'ateliers de Cotonou, le lendemain, de même qu'une résidence, avant qu'ils ne se rendent à Ouidah pour la commémoration de la fête du vaudou, le 10 janvier. Du 11 au 17, Abomey a reçu les deux groupes d'artistes pour encore des visites d'ateliers et des échanges de tous ordres, ce qui s'est poursuivi, le 18, à Porto-Novo, avec leurs collègues de la localité.

Kaman Esso, entre Marie Busson et Sarah Dugrip, était venu soutenir ses collègues ...


En fin de parcours, l'Atelier Unik-lieu de création contemporaine s'est imposé comme le creuset d'expression et de brassage des apports artistiques spécifiques, les 19, 20 et 21 janvier.


Le reste du calendrier

Dès le départ de Cotonou des visiteurs bellevillois, le lundi 23, les organisateurs intégreront le laboratoire de la préparation de la deuxième phase du Projet Waba ; cette fois-ci, ce sont les artistes béninois qui se rendront à Belleville pour quatre jours, du 11 au 14 mai 2012.
Troisièmement, l'ultime rendez-vous est celui d'octobre-novembre 2012 à Cotonou, avec les Portes ouvertes sur les Ateliers d'artistes.



Des échanges enrichissants et épanouissants

La résidence de production collective d'oeuvres artistiques entre Béninois et Bellevillois s'est révélé une opportunité d'échanges d'ordres technique, intellectuel, artistique, mettant en commun, dans un contexte d'universalité de l'art, des manières de travailler rendues parfois différentes par le milieu géographique. Si, pour certains des artistes, la découverte d'un comportement de travail particulier est réel, pour d'autres, la résidence a suscité la reconnaissance chez l'autre d'un processus de création qui ne trompe pas. De toute façon, ils ont vécu un jeu. Mais, de part et d'autre des Béninois et des Bellevillois, l'enthousiasme et la joie d'avoir réussi quelque chose ensemble étaient à leur comble, ce qui a conduit un certain nombre d'entre eux à nous confier leur bonheur :

Guillaume Berga, peintre et graphiste :


"Je suis très ravi ! Nous avons eu trois jours très enrichissants, très productifs ... Il y a eu une petite hésitation sur le choix du thème ... Cela semblait très difficile de démarrer avec un thème ; il est arrivé après la première journée de travail, on a collaboré de façon très libre ... "



Philippe Abayi, artiste et Président des associations professionnelles des plasticiens et graphistes du Bénin (Faplag-Bénin) :


"Ce genre de rendez-vous est à répéter aussi longtemps que c'est nécessaire. Dans un pays où il n'y a pas d'école, le seul moyen que nous avons encore, c'est d'échanger entre professionnels, pour partager sur l'évolution de l'art contemporain, pour ne pas être en marge de l'actualité ; les artistes sont tous les mêmes, les discours n'ont pas été divergents. C'est à l'actif de l'évolution de l'art dans le monde et dans notre pays. Que l'idée des artistes béninois à Belleville puisse se concrétiser, avec tout ce que chacun peut faire !"


Marie Busson, sculptrice et plasticienne :


"C'est super ! C'est une vraie rencontre dans la joie, avec des surprises : le fait que les oeuvres aient évolué, ont commencé d'une certaine façon, c'était super !"


Benjamin Déguénon, palsticien :


"Je suis très content d'avoir eu la chance d'être sélectionné pour participer à cet atelier d'échanges avec les artistes de Belleville et ceux du Bénin. Ce qui m'impressionne : on n'a pas fait de l'individualisme ; ensemble, on a essayé de conjuguer nos efforts, ce qui fait que nous avons travaillé comme ça, sur le thème :"L'un dans l'autre" ; il y a eu une conjugaison des cultures et cela a marché. Je ne peux que remercier l'Association Elowa, pour une telle initiative."


Nicolas Dupeyron, peintre et carnettiste :

Rémi Secret (A gauche) et Nicolas Dupeyron (A droite)

"Je suis très heureux qu'on ait réussi à mettre en pratique ce qui avait été prévu, c'est-à-dire, que chacun travaille dans les toiles de l'autre ... "


Marius Dansou, spécialiste des masques :


"Une très belle expérience ! Ce qui est important, c'est l'échanges de cultures : est-ce qu'on va bosser sur ce thème ? Qu'est-ce qu'on va faire ? C'est tombé du ciel ... " (Rires)


Sarah Dugrip, plasticienne et graphiste :


"J'ai adoré ! J'ai trouvé ça très motivant ! J'ai aimé la facilité avec laquelle cela s'est passé ... Il y a eu un esprit de groupe, une émulation ... Pas de compétition ... Cela se passait naturellement comme si on avait toujours fait ça ..."


Romuald Mèvo-Guézo, plasticien :


"Il fallait voir ce que l'autre sait faire, à quel niveau nous sommes dans notre création. Il faut voir l'autre faire, voir si notre art est au top niveau ... "


Zansou, plasticien :


"Mes impressions sont bonnes. Tout ce que je souhaite, c'est que cette initiative puisse continuer ..."


Réalisation : Marcel Kpogodo

dimanche 15 août 2010

Initiatives culturelles innovantes au Bénin

Rafiy Okéfolahan, Président de l'Association Elowa et initiateur de Waba





Waba, en sa première édition



Quatre figures, un parcours hors de l’anonymat




S'il y a un événement qui a marqué l'année 2010, c'est Waba. La première édition de ce Festival s’est tenue du 05 au 10 juin 2010, dans le contexte de la vaste initiative culturelle concrétisée par le Ministère béninois de la Culture, en collaboration avec Cultures France et l’Ambassade de France près le Bénin, pour commémorer le cinquantenaire des indépendances africaines. Il s’agit d’une grandiose manifestation multidimensionnelle dénommée Regard Bénin 1.0, qui a mobilisé, dans une synergie néanmoins spécifiante, plusieurs opérateurs culturels privés et publics, béninois et étrangers. En ce qui concerne Waba, il a permis aux artistes plasticiens de Cotonou et de Porto-Novo d’ouvrir leurs ateliers au public, afin que celui-ci s’imprègne de l’intimité de leur création, qu’il découvre leurs conditions de travail et qu’il se renseigne sur la manière dont l’inspiration se métamorphose progressivement, par leurs soins techniques, intellectuelles et esthétiques, en une œuvre devant laquelle le monde entier viendra s’extasier, si elle se révèle d’une qualité hors du commun. Waba est donc un événement ayant mobilisé un nombre impressionnant d’artistes peintres, sculpteurs, plasticiens, vidéastes, des plus connus à ceux qui le sont moins, ce qui a fait participer à une même philosophie d’ouverture et de partage d’expériences de réussite, d’inusable espérance et de faits de précarité, notamment, Dominique Zinkpè, Philippe Abayi, Charly d’Almeida, Ludovic, Fadaïro, Kajero, Grek, Tchif, Totché, Eric Ahouansou, Midy, Kaman Esso, du Côté de Cotonou, et Youchaou Kiffouly, Virgil Nassara, Simplice Ahouansou, Ange, entre autres, à Porto-Novo. Ce sont, en tout et pour tout, 46 artistes dont deux femmes qui ont libéré, dans l’intimité de leur atelier, ce qu’ils ont jugé bon que les visiteurs connaissent d’eux, par le biais des cinq parcours prévus par bus pour la capitale économique, et des deux, pour la ville aux trois noms. Cette démarche unique de développement d’une humilité et d’une générosité inattendues chez ces créateurs a débouché sur la mise en vue de ceux d’entre eux auquel le public des connaisseurs et des simples observateurs n’est pas habitué : Romi, Amouros, Kaman Esso, d’une part, frappent par leur détermination à se faire un nom dans un univers d’une exigence imparable, et Théodore Dakpogan, d’autre part, impressionne du fait de sa recherche d’une rigueur technique d’une qualité renouvelée et plus porteuse.





Romi, un cachet d’authenticité


Dimanche 06 juin, deuxième jour de Waba, à Togbin, sur la route des pêches, un terrain de pique-nique en effervescence : l’aboutissement du Parcours ’’Océan’’, le troisième parmi les cinq prévus à Cotonou par Waba. Les visiteurs descendent du bus et Rafiy Okéfolahan, principal organisateur du Festival, nous dirige vers un atelier circonstanciellement installé, celui de Romi, une des rares femmes participantes. Teint clair, alerte, elle ne tarde pas à nous présenter quelques tableaux de son œuvre. Au fil des discussions qu’elle anime, surprise : l’artiste plasticien béninois très connu, Simon Soha, qui n’a pas participé à Waba, y a laissé une représentante, elle que ce maître a formée en deux ans et qui estime que c’est plutôt la peinture qui est venue à elle. Par conséquent, son investissement dans le domaine des arts plastiques a consisté à s’imprégner de techniques, afin de se spécialiser. Comme résultat, les pièces qu’elle montre, l’une après l’autre, nous font découvrir un investissement particulier de cette jeune femme dans la technique des pointillés aborigènes et des silhouettes de femmes ; elle récupère aussi des pagnes et utilise la terre comme matériau. Cette artiste, qui comptabilise environ quatre années dans cet univers, qui, après n’avoir pas réussi à obtenir le Baccalauréat, s’est investie dans l’informatique avant de se tracer un chemin plus convaincu vers l’art, n’exerce désormais que lui et en vit. Romi, dans une voix claire, précise que les thèmes qui l’inspirent, c’est tout ce qui bouge, plus spécifiquement la femme dont la cause pour la libération sociale fait le fondement de ses toiles et, aussi, tout ce qui se trouve lié à elle, notamment, les enfants, les enfants délaissés, les enfants rejetés dont elle veut donner de son énergie artistique à améliorer le devenir. Romi n’a pas froid aux yeux ; sûre d’elle, Waba lui donne des raisons d’exulter, ayant été une véritable opportunité pour elle de sortir de l’anonymat.






Amouros, le porte-flambeau des personnes handicapées


Jumelé à l’atelier de Romi, celui d’Amouros, de son vrai nom, Amour Yémadjro. D’une complicité certaine avec elle, son parcours n’en est pas moins spécifique. S’il exerce dans les arts plastiques depuis six années, il a beaucoup exposé dans le Nord-Bénin et travaille à Cotonou, à Togbin, au bord de la mer. Handicapé moteur, il n’est pas allé chercher bien loin les thèmes de son œuvre dont les toiles se distinguent toutes par des dessins de personnes handicapées : les enfants placés, encore appelés ’’vidomègons’’, les enfants travailleurs en bas âge et, naturellement, les êtres humains handicapés dont il veut intéresser et sensibiliser le public au sort peu enviable. S’il avoue vivre un peu difficilement de ses toiles, ses yeux brillent instantanément lorsqu’un visiteur évoque avec lui le 1er août prochain. Selon lui, la commémoration du cinquantième anniversaire de l’accession du Bénin à la souveraineté internationale, constitue une véritable opportunité pour les jeunes artistes béninois qui devront se pointer à Porto-Novo, centre névralgique des festivités, pour exposer des toiles, faire partager leurs idées et, face aux touristes, aux connaisseurs et aux curieux, sortir davantage de l’anonymat.


Théodore Dakpogan, le patron chercheur

Porto-Novo, jeudi 10 juin, le dernier jour du Festival Waba. Présent à la Maison du Patrimoine, pour suivre de près la clôture de l’événement, il avait au préalable accompli la formalité de nous parler un peu de lui au Centre culturel Ouadada, son point d’exposition. Né dans les mêmes années que l’accession du Bénin à l’indépendance, son regard n’est pas celui d’un naïf qui se cherche dans le domaine des arts plastiques. Au contraire, armé d’une assurance d’airain, il déroule son parcours d’artiste sculpteur, parti du métier de forgeron. Sa voix, quelque peu critique envers Waba dont il espère que les prochaines éditions travailleront mieux à drainer des visiteurs plus nombreux vers les exposants de la ville-capitale politique, nous révèle ses débuts en 1990 avec la Coopération française qui lui donna l’opportunité d’une grande exposition très réussie et fructueuse au Palais de Honmè. En dix ans d’exercice, ses yeux brillent d’une joie nostalgique lorsqu’il laisse lire en eux ses nombreux voyages d’exposition au Bénin, en Afrique, en Europe et à travers le monde. A l’heure actuelle, il expérimente un grand isolement pour découvrir de nouvelles voies d’un art sculpteur plus novateur. Théodore Dakpogan, marié, quatre fois père, vit exclusivement de l’art qu’il fait par le biais des tôles, des bouts de verre, des vis, des boulons, des chaînes et des dents d’engins qu’il récupère et reconvertit en pièces de modelage de ses personnages. Quelques fois, il se rapproche de la forge à laquelle certains travaux ponctuels le ramènent. Les personnages qu’il a matérialisés récemment portent la marque d’un regard profondément dénonciateur du comportement des jeunes filles béninoises d’aujourd’hui qui, habillées en pantalon, laissent déborder leurs perles. S’il se laisse aller à la sensibilisation, c’est pour les appeler à changer de comportement et, dans un autre registre, pensant à la commémoration des 50 ans de son indépendance par le Bénin, il exhorte les pouvoirs publics à penser au développement du pays et, surtout, à doter les artistes d’un vrai statut, comme cela est le cas dans bien de pays de la sous-région.




Kaman Esso, le Doyen aux messages percutants

« A tout seigneur, tout honneur ». La visite de son atelier sis quartier Aïbatin, au détour d’une ruelle, fait découvrir, à l’entrée, à gauche et à droite, un projecteur, ce qui rappelle son métier de photographe et qui lui permet de préciser au petit monde visiteur qu’il a aussi exercé en tant qu’imprimeur. Ce sexagénaire qui, apparemment, se prépare un destin de la Capverdienne Césaria Evora, ne cache pas, d’entrée de jeu, son enthousiasme pour Waba, lui qui a la chance de recevoir une grande visite, dès le premier jour de la manifestation. Confessant très tôt que son nom ’’Kaman Esso’’ signifie, en nago, ’’Connaissons nos limites’’, il se présente comme un homme qui n’aime nullement exagérer en ce qu’il fait. Dessinateur depuis son âge d’enfant, ayant exercé à l’étranger les deux métiers évoqués précédemment, il ne s’est remis aux arts plastiques que trois années auparavant ; ses tableaux, de format légèrement en dessous de la moyenne, côtoient très peu l’abstraction et font découvrir une peinture réaliste dont le message trouve sa compréhension dans une exploration philosophique du monde. Au bas de quelques-unes de ses toiles, la signature n’est pas ’’Kaman Esso’’, mais tient en une phrase : « Les mains prolongent la pensée », ce qu’il explique en rendant hommage au Créateur qui a pourvu l’homme des mains lui permettant de « marquer ses sentiments, de démontrer ce qu’il est et ce qu’il fait ». Evoquant sa démarche, il se déclare imprégné de tout système artistique et peint de préférence à l’huile pour parler au public de tout ce qui se passe autour de lui. Kaman Esso, originaire de Pobè, né à Abomey d’une mère originaire de cette ville et d’un père natif d’Agonli, impressionne par la force et la profondeur avec laquelle il convertit des phénomènes simples de la vie en des leçons que les hommes devraient se donner l’humilité de suivre, afin de mener une existence davantage heureuse et épanouissante. Néanmoins, il lui tient fortement à cœur de faire passer que les autorités de notre pays devraient travailler ardemment à amener les féticheurs, les marabouts et toutes les formes de pratiquants de l’occulte à tourner leurs activités vers le bien, à faire en sorte que le gris-gris travaille plutôt au bonheur des Béninois. Le contraire aujourd’hui, selon lui, est le résultat du refus de ses compatriotes de fréquenter leur village et de bon nombre de Béninois de la diaspora de rentrer au pays, pour contribuer à son développement. Cet artiste qui s’exprime ainsi, qui se rend intarissable quand il s’agit d’évoquer de précieuses leçons de vie et qui est décidé à rompre avec l’anonymat artistique porte comme vrai nom Lucien Houéssou.

Réalisation : Marcel Kpogodo