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jeudi 27 janvier 2022

« Kan xóxó nù » à découvrir au ’’Centre’’ de Lobozounkpa

Dans le cadre du vernissage de l'exposition 


Après de long mois de silence liés à la Covid 19, l’espace artistique et culturel,  ’’Le centre’’ de Lobozounkpa, a repris ses activités, le vendredi 21 janvier 2022, à travers le vernissage de l’exposition,  « Kan xóxó nù ». 

Découverte des œuvres par le public après le vernissage

Des œuvres d’une dizaine d’artistes béninois et d'autres nationalités. Ce qu'il faut attendre de « Kan xóxó nù », l’exposition dont le vernissage a fait déplacer le public, dans la soirée du vendredi 21 janvier 2022, au ’’Centre’’ de Lobozounkpa. Cette expression signifie, littéralement, ’’Au bout de l’ancienne corde …’’, une façon, sûrement, de rappeler un proverbe bien connu des Béninois : « C’est au bout de l’ancienne corde qu’on tisse la nouvelle ».

Dans une ambiance de joie, le public s'est laissé conquérir, successivement, par les œuvres d’Uché James Iroha, Catherine de Clippel, Yvon Ngassam, Eric Bottéro, Cortex Asquith S., Nazanin Pouyandeh, Audace Aziakou, Sébastien Boko, Sarah Trouche et par un tableau de l’atelier de la famille Yémadjè.

Uché James Iroha, dans ses photographies, montre des personnages habillés en tenues traditionnelles, dans une boîte de nuit. Malgré le luxe qui les entoure, ils restent fidèles à leur culture. Catherine de Clippel renvoie au culte ''vodun'', avec le noir-blanc des photographies qu'elle présente. Quant à Yvon Ngassam, ce sont des casques de motos qui sont transformés en objets d’art, rappelant les masques ’’Guèlèdè’’ des cultures yoruba et nago du Bénin, du Nigéria et du Togo. S’agissant d’EricBottéro, il fait valoir une pharmacie ’’vaudou’’, composée essentiellement de bouteilles de sérum, utilisées dans la médecine moderne. Dans un style qui lui est particulier,  Nazanin Pouyandeh, de son côté, aborde, le monde contemporain et le monde traditionnel ; elle y demande de se souvenir de ses ancêtres et du culte ’’vaudou’’. Avec Sarah Trouche, il faut se rendre compte du résultat de dix séances de travail avec des enfants : une toile appliquée, en référence à la technique de la tenture pratiquée au Danxomè, depuis le temps du roi Agadja. Tout comme l’œuvre de cette artiste française, une toile appliquée de l’atelier de la famille Yémadjè affirme la force d’une divinité.


Talents béninois de la nouvelle génération

Trois jeunes artistes béninois, invités à joindre leurs œuvres à la collection du ’’Centre’’, ont su captiver le public par leur création.

Cortex Asquith S., artiste visuel, designer et diplômé en relations internationales, donne envie de voir une série de deux œuvres intitulées ’’Infirmières doto gbo azon tché’’, ''Les infirmières m'ont guéri (e)'', en français. Elles mettent en superposition deux mondes : le traditionnel et le moderne. Elles sont réalisées au marqueur sur du papier bristol d’une dimension de 65 X 100 cm ; une infirmière y soigne le corps, une autre, traditionnelle, guérit l’âme et l’esprit à travers la préparation d’infusions en chants et musique.

Photographe professionnel, Audace Aziakou, en ce qui le concerne, a hérité de la photographie de son père et de son grand-père. Ayant à son actif une dizaine d’années d’expérience, avec plusieurs expositions, tant aux plans national qu’international, fait ressortir, dans sa production, le côté moderne des revenants, ’’Egoun-goun’’ et le savoir-faire traditionnel des artisans qui fabriquent leurs costumes.

Avec Sébastien Boko, le regard suit une pièce atypique sculptée grâce au métal tiré de voitures et de motos et en a conçu un habit d’ ’’Egoun-goun’’, dénommé ’’L’habitat des invisibles’’.

’’Le centre’’ de Lobozounkpa gagne ainsi le pari de sa première exposition de la nouvelle année qui s'achève le 20 mars 2022 et laisse place à de nouveaux défis à relever. Il est situé à Atropocodji, dans l’arrondissement de Godomey, principalement, dans la ruelle du collège ’’La plénitude’’.

Pour cette reprise des activités, Marion Hamard, Directrice du ’’Centre’’ de Lobozounkpa, a saisi l’occasion pour présenter au public, non seulement la collection de tableaux du complexe artistique et culturel indiqué mais, aussi, pour montrer de quelle manière les artistes contemporains peuvent associer la tradition africaine à la modernité, dans leur création.

Annick Zondéhinkan


Interview ...

Marion Hamard : « […] on espère que les gens vont venir nombreux pour voir cette exposition […]

En marge du vernissage de l’exposition, « Kan xóxó nù », Marion Hamard, Directrice générale du ’’Centre’’ de Lobozounkpa, a bien voulu nous en livrer, notamment, les motivations …  

Marion Hamard

Stars du Bénin : Marion Hamard, nous sommes au vernissage de l’exposition, « Kan xóxó nù ». Cela fait de longs mois que ’’Le centre’’ a organisé des expositions à cause du Covid-19. Qu’est-ce que cela vous fait de revoir le public, de reprendre contact avec les artistes, de façon générale ?

 

Marion Hamard : C’est des mois qui ont été longs. Sur 2021, on n’a présenté que deux expositions alors qu’habituellement, on en présente entre cinq et sept par an. Evidemment, c’est lié à la pandémie qui a fait qu’on a fortement réduit nos activités, en relation avec les institutions gouvernementales, pour éviter la propagation du virus. Donc, c’est beaucoup de bonheur.

C’est important, aussi, pour nous, quand on travaille, de voir les publics et les artistes qui sont là et qu’on se retrouve tous, parce qu’en effet, cela fait plusieurs mois qu’on ne s’est pas retrouvés. L’équipe est heureuse d’enfin pouvoir recommencer ses activités, et puis, commencer l’année par un vernissage me semble plutôt être en adéquation avec l’identité du ’’Centre’’. Donc, on est comblés, ce soir.

 

Quels sont les objectifs qui sous-tendent cette exposition que vous organisez ?

Lorsque les artistes viennent en résidence de création au ’’Centre’’, ils nous font don d’une œuvre pour qu’on puisse fonder une collection. Cela fait partie du contrat que nous passons ensemble. La réflexion a été menée par l’équipe : finalement, avoir une collection, c’est une chose, et on la montre très peu.

L’autre idée était de commencer l’année par la présentation de ces œuvres qui racontent un fragment de notre histoire et de la mettre en relation avec quelques productions récentes, avec les artistes invités comme Cortex Asquith S., Audace Aziakou et Sébastien Boko. Sinon, toutes les autres œuvres qu’il y a dans cette exposition sont extraites de notre collection ; elles ont été produites en résidence de création au ’’Centre’’, ces cinq dernières années.

 

Sur quelle base avez-vous pu inviter ces trois artistes dont vous venez de parler ?

La base de l’exposition est vraiment partie de la nature de notre collection. On a constaté que la question des traditions se retrouve dans beaucoup de créations de ces artistes qui venaient en résidence, d’un point de vue intellectuel, philosophique ou plastique, comme vous avez pu le constater.

Ces dernières années, on a eu des coups de cœur pour ces trois artistes. Donc, on s’est dit que, faire rencontrer ces artistes et des productions qui nous ont fait écho et qui dialoguent, c’est aussi une bonne chose. On ne doit pas rester dans le passé ; on doit rester dans le présent. C’est aussi la thématique de l’exposition.

Le titre de l’exposition incarne aussi ce choix des œuvres qui ont été créées préalablement, ce qui se passe aujourd’hui et comment les faire dialoguer, parce que chaque artiste ou chaque œuvre que vous voyez a une histoire très singulière et quasiment émotionnelle pour nous. Voilà : il y a la visite officielle des œuvres avec les propos des artistes et on pourrait faire des visites beaucoup plus subjectives avec des rencontres humaines, des générosités, des sensibilités qui ont créées cette exposition.

 

Cette exposition peut-elle être perçue comme une rentrée ?

On peut dire cela : une rentrée post-interdiction liée au Covid et aussi comme l’envie d’un nouveau départ après ces deux dernières années qui ont été éprouvantes pour ’’Le centre’’, pour tous les acteurs du milieu culturel et pour les artistes. C’était un moment difficile et on nous a rappelé quelle était la place de la culture dans le monde entier.

 

Pour ce nouveau départ, ’’Le centre’’ a certainement prévu beaucoup d’autres activités pour 2022 …

Pour 2022 ? Vous serez très prochainement avec nous pour voir cela, non ? Ce qui est important pour nous, c’est de pérenniser les actions qu’on a déjà, donc, tout ce qui est jeune public, accompagnement d’artistes.  Après, on souhaite encore développer d’autres axes. Mais, c’est encore un autre travail en cours. On attend les réponses de nos collaborateurs. Donc, je ne peux pas vous donner de réponse.

En effet, au-delà de pérenniser, on va essayer de s’engager dans de nouveaux axes, de trouver de nouveaux types d’événements et de nouvelles méthodologies de travail, pour se renouveler.

 

Avez-vous un mot de fin ?

J’espère fondamentalement que toutes les entités qui composent la société vont prendre conscience de l’importance de la culture pour toutes les sphères, qu’elles soient économique, artistique, éducative,… Et, on espère que les gens vont venir nombreux pour voir cette exposition, en particulier, et aux événements du ’’Centre’’, en général.

 

Propos recueillis par Annick Zondéhinkan

samedi 22 juillet 2017

Eric Bottéro, un regard irrésistible sur le vaudou

A l’issue d’un mois de résidence de création


Eric Bottéro est un artiste-photographe français qui a séjourné pendant une trentaine de jours au ’’Centre’’ de Godomey, dans le cadre d’une résidence de création. Le regard émerveillé de l’homme et la générosité de son langage en disent long sur la réussite d’une expérience qu’il a effectuée sur le vaudou et dont il a rendu compte aux journalistes culturels, le jeudi 13 juillet 2017.

Eric Bottéro, en possession de son kit de protection
Caressant le visage, de fins et plus ou moins longs rameaux donnent entrée à une belle salle de travail avec des masques aux murs, celle-ci comportant différents ordres de supports sur lesquels sont alignés, respectivement, des ’’botio’’ verts, ici, connus comme des statuettes utilisées dans les cultures africaines à des fins de nuisance mystique, une série de flacons contenant du liquide pour guérir des maladies, sans oublier, dans un coin, un tronc de bois noir, verticalement posé dans lequel sont implantés de gros clous à tête et dont le sommet est surmonté d’une sorte de parapluie en miniature abritant une statuette de bonhomme, ce tout, la représentation d’un ’’assin’’, l’autel des ancêtres, propice à diverses cérémonies, et, quelque part, ailleurs, la sculpture de ’’Hèviosso’’, le dieu de la foudre puis, non loin de lui, celle de son épouse. Le décor du vaudou dont le caractère ordinairement redoutable se trouve balayé par le sourire rassurant d’Eric Bottéro, photographe français d’art, faisant face aux hommes des médias, pour des explications sur ces résultats d’une trentaine de jours d’une résidence de création, par ce milieu d’un après-midi doucement ensoleillé, le jeudi 13 juillet 2017, au ’’Centre’’ de Godomey, à Atrokpocodji, dans la Commune d’Abomey-Calavi.
« Il faut assumer vos valeurs, vos traditions, vos secrets », dit Eric Bottéro, comme pour desserrer l’étau d’effroi sur certains visages. Ce photographe d’art, d’un genre particulier, ayant exercé, à la base, dans le monde de la mode, fabrique de ses mains les modèles qu’il va plus tard immortaliser, de son appareil. C’est ainsi qu’il est à l’initiative de toutes les pièces précédemment évoquées, qu’il a présentées aux journalistes. A en croire ses propos, Dominique Zinkpè, Directeur exécutif du ’’Centre’’ de Godomey’’, en a été pour beaucoup dans son instruction sur le vaudou. Et, dans la foulée des orientations qu’il a reçues, il s’est procuré bon nombre de pièces, ce qui lui a facilité la reconstitution d’objets caractéristiques de l’atmosphère du vaudou.
Conséquence : la fascination première s’est développée et a produit un effet de dépouillement de  son regard de tout ce que le vaudou annonce de négatif et de repoussant chez le Béninois, lorsqu’il en entend parler.
L'artiste, dans son univers-modèle
Pour lui, ce système religieux est hautement productif, dans sa capacité à guérir des maladies, dans une « pharmacie vaudou », grâce à l’exploitation du secret des plantes, des essences, à « guérir et à soulager les maux de la vie, à rapporter l’amour, la pluie, l’être aimé, tout ce qu’on peut espérer », se réjouit l’artiste. Loin, en outre, de vivre une fascination béate, il oriente tous vers un comportement qui est déjà le sien : le respect vis-à-vis des différentes dimensions du vaudou : le fonctionnement interne avec les pratiques cultuelles, l’organisation des initiés, la tenue des couvents, les représentations des divinités, l’existence d’une véritable hiérarchie.
Par ailleurs, pour Eric Bottéro, l’ouverture du vaudou au monde est nécessaire, indiscutable : « Il faut réduire les barrières entre le secret et le visible », commente-t-il. Cette vision lui fait entrevoir de faire des objets cérémoniels de cette religion des produits marchands en bonne et due forme, que le consommateur pourra se procurer dans des magasins, à travers le monde. Un modèle typique de ce genre d’objet est un kit de protection, qu’il n’a pas manqué de confectionner, lui qui voit dans le vaudou un système semblable à la mondialisation. Ainsi, à en croire ses analyses, l’ ’’assin’’, l’autel des ancêtres, n’est rien d’autre qu’un système de connexion wifi de l’homme avec ses ancêtres, ce qui se trouve réalisé par l’officiant traditionnel.
De plus, Eric Bottéro valorise le vaudou qu’il célèbre comme un creuset remarquable d’une riche production artistique, à travers, notamment, la sculpture des statuettes, les chants et les danses qui sont conçues pour donner du poids aux cérémonies. Eric Borréto et le vaudou, voilà donc une histoire d’amour, qui devrait se faire contagieuse, de quoi amener les pratiquants authentiques de cette religion à une exploitation plus productive pour l’Africain et l’Afrique.


Marcel Kpogodo