vendredi 21 novembre 2014

Rafiy Okéfolahan et Charly Djikou, deux valeurs sûres de l’art béninois

Ils réalisent l'exposition ’’Hwenuxo’’ au ’’Centre’’ de Lobozounkpa


Le vernissage de l’exposition ’’Hwenuxo’’ s’est déroulé le jeudi 13 novembre 2014, en début de soirée, au complexe culturel dénommé ’’Le Centre’’, situé à Lobozounkpa, dans la Commune d’Abomey-Calavi. La manifestation a permis de faire découvrir au public des œuvres, créées sur place, des deux artistes exposants, Rafiy Okéfolahan et Charly Djikou, chez qui il ne fait l’ombre d’aucun doute de l’existence d’un talent leur réservant une carrière explosive.


Rafiy Okéfolahan, à gauche, et Charly Djikou, à droite
Les grandes allées du ’’Centre’’ balisées par des lanternes allumées, de quoi orienter les visiteurs. Ce contexte chaleureux a permis à un grand nombre de personnes, parmi lesquelles des artistes, des connaisseurs de l’art plastique, des journalistes et des curieux, de participer au vernissage de l’exposition ’’Hwenuxo’’, le jeudi 13 novembre dernier, à Lobozounkpa, le quartier de la Commune d’Abomey-Calavi où se situe ’’Le Centre’’.
Prévue pour durer deux mois, cette exposition est le résultat de 30 jours de travail, à travers une résidence de création, de la part de Rafiy Okéfolahan, artiste plasticien, et de Carly Djikou, sculpteur spécialisé dans la pierre. Ceux-ci semblent ne pas avoir ménagé leurs efforts, ce qui a laissé à la dégustation visuelle des visiteurs, du côté de chacun des artistes, un peu moins d’une vingtaine d’œuvres.
Selon le premier, ’’Hwenuxo’’ signifie ’’événement’’, l’histoire vécue avec le lieu de la résidence de création. Et, justement, celle qu’il a choisie de narrer par ses tableaux, réalisés au moyen de l’acrylique sur toile, est celle, tragique et préoccupante, de ce qu’il a nommé « Les kamikazes urbains » qui ne sont personne d’autre que les transporteurs d’essence frelatée, de même que ceux qui en assurent la vente, au bord des routes du Bénin. Un regard profond, d’un tableau à l’autre, au travers des couleurs vives et rayonnantes, laisse percevoir la silhouette de ces déshérités qui, fortement, croient qu’ils n’ont pas d’autre choix, pour vivre, que de mener cette activité dangereuse. Et, pour appuyer cette action de réprobation de cette vision fataliste qu’il réprouve, Rafiy Okéfolahan, d’une part, a émis une installation suggestive, ’’Waba oil building’’, faite d’un pilier vertical construit à partir de bidons et de bouteilles en plastique, comme pour symboliser le matériel de travail de ces ’’kamikazes’’ ; ce pilier héberge, presqu’en son centre, une vidéo, profondément alarmante, déroulant le film macabre de la tuerie orchestrée, en série, par la manipulation approximative, peu précautionneuse, périlleuse et maladroite du produit inflammable qu’est l’essence, par des personnes qui, en réalité, ne sont pas techniquement préparées à cela. D’autre part, il a fait réaliser un graffiti sur l’un des murs latéraux de clôture du ’’Centre’’ : un conducteur de taxi-moto, encombré de bidons d’essence, attachés à son porte-bagages. Cet acte d’insistance artistique témoigne de la forte préoccupation par l’artiste pour cette question de l’écoulement de l’essence frelatée. 
Par ailleurs, la convergence des inspirations a laissé les deux artistes exposants combler le public d’une œuvre collective : ’’Bobo’’.
Charly Djikou, lui, matérialise plus de vingt ans d’expérience, dans son domaine de la sculpture sur pierre, par une série de sculptures réparties dans les salles d’exposition du ’’Centre’’ ; elles sont, soit en granite, soit en marbre. A travers elles, lui qui porte comme fait d’arme essentiel d’avoir réalisé la statue de Toussaint Louverture à Allada, il choisit, en guise de ’’Hwenuxo’’, de relater le quotidien de la vie de l’homme, d’où des titres assez indicatifs : ’’J’observe’’, ’’Les trois amis’’, ’’Les larmes de la pierre noire’’, ’’Le couple’’, ’’La grande gueule’’, ’’Akowé’’, ’’Sêdjinnasso’’, notamment. A en croire les propos de cet autodidacte persévérant, ces fruit si délicieux pour le regard et l’esprit résultent de l’exploitation de la pierre en provenance de plusieurs localités du Bénin : Abomey, Dan, Dassa, Lokossa, ce qui n’est guère facile, surtout qu’il lui faut se protéger, lors de son travail sur ce matériau, contre les tessons, les morceaux de pierre pouvant percer la peau, contre la poussière, entre autres, de même qu’il doit se vêtir particulièrement en portant un protecteur d’oreilles, un cache-nez, des gants, une chemise de manche longue, et qu’il doit s’armer de burin, de marteau, de meule électrique, notamment.

Les artistes Charly Djikou et Rafiy Okéfolahan, échangeant avec leurs visiteurs du Complexe scolaire "La plénitude"
Il faudrait donc s’intéresser davantage à Rafiy Okéfolahan et à Charly Djikou, ces deux artistes d’une démarche et d’une inspiration avérées, dont les autorités d’un complexe scolaire de la place, dénommé ’’La plénitude’’, se sont déplacées pour voir les œuvres si remarquables, un fait de certitude que, sous peu, une certaine jeune pousse ne manquera pas d’emboîter à ces deux génies d’artistes, peu considérés au Bénin. 

Marcel Kpogodo

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